Dans une logique patrimoniale qui évolue avec l’augmentation de la longévité et les recompositions familiales, l’assurance-vie n’est plus seulement un outil d’épargne ou de prévoyance, mais devient un véritable instrument d’architecture familiale. Intégrée dans une stratégie de donation progressive, elle permet non seulement de transmettre efficacement, mais aussi de bâtir une vision patrimoniale sur plusieurs générations.
Dans ce contexte, l’assurance-vie s’impose comme un instrument à la fois souple, puissant et fiscalement optimisé, en particulier lorsqu’elle s’intègre dans une démarche de donation progressive.
L'assurance-vie : un véhicule patrimonial à géométrie variable
Souplesse contractuelle et liberté de désignation
L’assurance-vie permet une désignation libre des bénéficiaires, à tout moment et en dehors des règles strictes de la réserve héréditaire. Notons d’ailleurs que ce placement ne fait pas partie de la succession à répartir entre les héritiers. Cette liberté rend possible la planification de transmissions ciblées, ajustables selon les besoins familiaux (enfants, petits-enfants, tiers).
Enveloppe fiscale avantageuse
Le contrat d’assurance-vie bénéficie d’une fiscalité allégée en cas de décès, notamment :
- l’exonération jusqu’à un certain plafond par bénéficiaire pour les versements effectués avant 70 ans (article 990 I du CGI)
- l’imposition réduite comparée aux droits de succession classiques.
Cela permet d’effectuer des donations différées mais fiscalement douces, en étalant les effets dans le temps.
La donation progressive dans une stratégie de démembrement
Le démembrement qui est plus courant en ce qui concerne les actifs tangibles tels que l’immobilier s’applique aussi pour les contrats de capitalisation et en particulier pour l’assurance-vie. L’approche consiste à se servir d’une clause bénéficiaire démembrée, c’est–à-dire faisant intervenir l’usufruit et la nue-propriété. Exemple : le conjoint est désigné comme étant l’usufruitier – aussi appelé quasi usufruitier, dans ce contexte – et les enfants sont les nus-propriétaires. En savoir plus sur euodia. fr.
Au décès du titulaire, le capital est versé à l’usufruitier, mais les droits des nus-propriétaires sont préservés. C’est-à-dire que le conjoint est libre de consommer le capital, mais qu’il est ensuite dans l’obligation d’en restituer sa valeur aux enfants nus-propriétaires (ou aux petits-enfants, selon la désignation mentionnées dans la clause bénéficiaire). Cette mécanique permet une transmission graduelle du capital sans les contraintes liées à la succession.
La donation progressive via les dons et les donations-partage
La donation progressive consiste aussi à transmettre par étapes, en mobilisant plusieurs outils, tels que les dons manuels ainsi que les donations-partages, et cela a lieu entre vifs. Dans ce cas, le titulaire effectue des retraits afin de les répartir entre son conjoint et ses enfants par exemple, indépendamment de la clause bénéficiaire, de même que de la clause du démembrement.
Les dons manuels d’argent ne nécessitent pas d’acte notarié : on peut donner de la main à la main, par virement, chèque ou remise de titres. Cela en plus de la possibilité de tirer profit des abattements fiscaux tous les 15 ans. Rappelons que cet abattement est de 100 000 euros par parent et par enfant, et qu’il est de 31 865 euros par grand-parent et par petit-enfant. Cela permet de fragmenter les dons pour optimiser les seuils fiscaux dans le temps. Par ailleurs, si le don reste modeste ou n’est pas fiscalement imposable, il peut rester discret.
La technique des multi-contrats
Cette stratégie est particulièrement adaptée aux familles complexes et recomposées, en sachant qu’elle consiste à ouvrir plusieurs contrats : un pour chaque génération, avec des clauses bénéficiaires différenciées. Il s’agit alors d’alimenter progressivement et de calibrer les versements selon l’âge et les revenus. Il est aussi question d'adopter une certaine transparence familiale : une donation progressive nécessite un dialogue familial pour éviter les conflits d’intérêts ou les incompréhensions sur la répartition future. La clarté des clauses bénéficiaires est primordiale : une rédaction ambiguë est susceptible d’entraîner des contentieux. Il est judicieux d’y inclure des clauses à options.